14 décembre 2006

L'émission qui a choqué la Belgique !

Je comprends la réaction à vif d ‘une grande partie de la population qui a été « choquée » par l’émission de hier soir. Jean-Paul Philippot, administrateur de la RTBF, s’excuse et se justifie en disant avoir « provoqué des émotions inattendues ». Effectivement, avec le brillant traitement du sujet, il ne pouvait en être autrement… Les auteurs de ce puissant canular ont suscité des émotions fortes. Ils ont touché à nos besoins primaires, comme le besoin de sécurité, de territoire, de sentiment d’appartenance à une communauté… Et l’hostilité et la violence des retours que la RTBF a subi hier en direct de la part des internautes sur les différents forums et blogs belges est à la mesure des sentiments profond que l’émission a suscité chez chacun de nous.

J’ai moi-même été bousculé quand, par téléphone, j’ai appris la « nouvelle »… J’étais de retour du bureau en voiture. Je trouvais bizarre qu’aucune chaîne de radio ne cesse ses programmes pour une intervention en direct, mais bon…

Une fois à la maison, après avoir compris qu’il s’agissait d’un canular et après le premier choc passé, j’ai immédiatement trouvé génial ce coup de bluff. Enfin quelque chose d’interpellant, de fort, de « vivant » ! Ensuite, tout le monde commence à en parler. Autant du principe du canular que de la séparation éventuelle de la Belgique et de ses éventuelles conséquences. Voilà une bonne nouvelle ! En tant que citoyen, j’ai l’impression d’enfin me réapproprier le débat, qui, en temps normal, m’échappe complètement…

J’ai l’impression que les débats sur les développements stratégiques de notre pays ou de l’Europe se passent dans de petits cénacles feutrés où des hommes politiques professionnels et sans doute animé de valeurs personnelles louables, échangent concessions et compromis afin de « gérer » au mieux « nos » intérêts collectifs. Mais à aucun moment, les grandes questions ne sont vraiment débattues avec les citoyens. Je prends pour exemple la constitution européenne, l’adhésion de nouveaux pays membres, la mise en libre circulation d’aliments issus de produits génétiquement modifiés, les modes de productions d’électricité à partie d’énergies fossiles, nucléaires ou renouvelables… Tout ces choix s’opèrent sans mon avis et influencent pourtant directement ma vie et celle des générations qui vont nous suivre…

On parle souvent de « débat citoyen ». Mais dans la pratique le monde politique est assez impuissant à le mettre en place. Hier soir, la RTBF a pris les devants et « jeté » le débat sur la place publique. On ne pouvait faire plus fort… Je comprends la colère, à peine contenue, des hommes et des femmes politiques qui doivent se sentir « dépossédés » de leur pouvoir… Ça ne doit pas faire du bien ni à l’égo, ni aux échanges discrets entre directions de partis sur les différentes négociations en cours…

J’ai trouvé les interventions des personnalité politiques, pourtant toutes unanimes entre elles, tellement à côté de « ma » réalité… Elio di Rupo, pour qui je ne voterais pas, mais que j’admire beaucoup, m’a paru enfermé dans une rigide posture « politique » d’un autre âge… Les Ecolos, qui prône pourtant de faire de la politique « autrement », avec Isabelle Durant qui se dit « estomaquée » par l ‘émission ou Jean-Michel Javaux qui s’est désolidarisé en direct sur le plateau télévisé m’ont paru coincés dans un « rôle ». Que dire des autres politiciens… Discours entendus, toujours bien argumentés, mais tellement peu habités, le ton faussement scandalisé, sans âme, déshumanisé…

Loin de moi, loin des questions que l’événement a suscité, loin de ce qui m’aurait touché, loin du citoyen que je suis… Je n’ai sans doute jamais senti aussi fort la fracture entre les hommes politiques et moi que hier soir… Et pourtant, je ne me suis sans doute jamais senti aussi concerné par la politique que hier soir… Paradoxe, paradoxe…

Pour ça, en tout cas, merci à toute l’équipe de la RTBF… Bravo et… Respect !

Allez, je file signer la pétition pour soutenir la RTBF. Je ne suis pas certain qu'elle en ai besoin, mais ça me fera plaisir ;-)

C'est ici : http://www.petitiononline.com/rtbf1312/petition.html

PS : un excellent article sur le sujet, vu de France : http://al1web.over-blog.com/article-4898930.html

Libellés :

6 commentaires:

À 12:11 AM , Anonymous Anonyme a dit...

Bravo pour ce coup là. J'ai eu l'info chez AL1 et puis j'ai signer la pétition !

 
À 6:12 PM , Blogger Unknown a dit...

Enfin les médias se reveillent, enfin les belges vont pouvoir comprendre et analyser les différents débats et avoir des réponses concrètes sur le développement de la Belgique future.

La RTBF a lancé un pavé dans la mare, elle a permis de faire avancer les choses et mieux... elle a permis aux citoyens d'ouvrir les yeux sur une question qui travaille bon nombre d'entre nous.

J'applaudis a deux mains :)

 
À 6:52 PM , Anonymous Anonyme a dit...

Je n'ai pas vu l'émission... seulement entendu les réactions. Je partage tout à fait l'avis de Xavier que je remercie d'avoir pris le temps de le mettrre en ligne.
Si nous voulons éviter que cette fiction devienne réalité, je crois qu'il faudra encore d'autres pavés dans la marre du "politiquement correcte" .

 
À 9:10 PM , Anonymous Anonyme a dit...

Moi aussi, Xavier, j’applaudis des 2 mains à cette démarche iconoclaste et surréaliste de la RTBF.

Et les politiques ont beau publiquement s’offusquer, je n’oublie pas, moi, les trois axes qui déterminent la mission de notre chaîne de télévision publique : « Informer, éduquer, divertir ». Une mission bien remplie ce soir-là.

Sur la forme, ce coup de pied médiatique dans le ronron de l’info nous montre aussi à quel point nous avons perdu notre esprit critique. L’info, oracle télévisuelle, serait-elle détentrice de la Vérité suprême ? D’aucun s’insurgent : qu’en sera-t-il désormais de la crédibilité journalistique ? Mais où se situe la marge entre la réalité et la fiction quand on sait que tout cadrage, tout montage… toute présentation d’un fait relève, qu’on le veuille ou non, d’une mise en image, d’une mise en scène et donc d’une véritable interprétation de la réalité. Quelle est d’ailleurs cette « réalité » qui, dès qu’on la relate, se trouve mise en représentation et donc rejoint, plus ou moins consciemment, le domaine de la fiction ? Que penser de cette même « réalité » qui nous échappera toujours tant elle fut « violée » avec plus ou moins de talent par Jules César qui nous racontait « sa » guerre des Gaules, par Leni Riefenstah qui glorifiait le régime nazi tout en révolutionnant l’art cinématographique… et de la propagande, par Patrick Poivre d’Arvor avec son vrai-faux interview du vieux Fidel, la macabre mise en scène du charniers roumain que tous les médias ont relayée, les Faucons de George Bush avec leurs « frappes chirurgicales » en Irak, etc

Extrait d’un micro-trottoir au lendemain de cette émission :
- Le journaliste – « Mais vous aviez quand même bien lu le sous-titre « Ceci est une fiction » ? »
- Le passant – « Oui, bien sûr, mais je n’y croyais pas ! »
Surprenant quand même de constater que lorsque l’émotion suscitée par un scoop est à son comble, tout ce qu’on pourra révéler par après ne sera pas cru…. Ou quand la fiction dépasse la réalité.

Maintenant que l’émotion est retombée, nous allons vraiment discuter du fond de cette émission…
Le 2 janvier à 20h, dans toutes les communes flamandes, les élus communaux prêteront serment sans jurer fidélité au Roi et à la Constitution, sous peine de ne pas voir leur nomination validée (DH du 16/12 – page 7). Un pas de plus vers l’autonomie ? Et ceci n’est peut-être pas une fiction…

Dominic

 
À 11:53 PM , Anonymous Anonyme a dit...

Je trouve que cette émission a eu le grand mérite d'enfin positionner ce débat; les garde fou étaient là et les réactions de vierge effarouchée des hommes politiques (Leterme en tête, lui qui est le premier à mettre le feu aux poudres) sont faiblardes, peu argumentées, formatée dans la politique politicienne coincée loin des préoccupations des gens et inspirées par leur ego personnel. Bravo donc à ces journalistes qui font leur métier.

et merci pour ce blog intéressant bien à ton image ...

 
À 10:58 AM , Anonymous Anonyme a dit...

Je n'ai pas vu l'émission (je n'ai pas la télé), j'ai par contre lu pas mal de contre-rendu, réaction sur des forum ou billets sur des blogs comme celui-ci.

Pour ou contre, la grande majorité des réactions portent sur la forme, y compris chez nos politiques, laissant de côté la question première : Pourquoi ?

Question peut-être beaucoup plus dérangeante et sur laquelle nos dirigeants wallons ne veulent s'étendre.

Pourquoi, en effet, nos voisins du nord ont-ils de tels ambitions séparatistes ? Peut-on, en définitive, se remettre en question et tenter de comprendre leurs points de vue et prendre en compte leurs arguments ?

Est-il judicieux de penser, comme je le pense pour ma part, que l'affairisme régnant, l'organisation empirique et la désastreuse gestion de nos contrées fassent de nous ce pitoyable "petit frère" que la Flandre "Première de classe" doit se traîner comme un boulet, un frein au développement ?

Je pense bien sûr que Flamands et Wallons ont des sensibilités différentes et que nos complémentarités ne peuvent que nous enrichir, nous et l'avenir de notre pays commun mais, de grâce, cessons de jouer les victimes.

Il est de temps de nous remettre en question, nous, et surtout, nos dirigeants !

 

Enregistrer un commentaire

Abonnement Publier les commentaires [Atom]

<< Accueil